Vendredi 31 mars, à 19 h 30, a eu lieu la veillée à Léoncel organisée par notre association sur « Le cheval du Vercors de Barraquand ». L’intervenant était François Lejeune, éleveur à Vassieux, président de l’Association nationale Cheval du Vercors de Barraquand, intervenant sur le passé, le présent et le futur de cette race de chevaux issue du troupeau de Jules Barraquand, une des grandes personnalités de Léoncel au 20e siècle.
F. Lejeune a passé le film de 1947, très attendu du public, sur la transhumance du troupeau Barraquand.
Photo du titre : Jules Barraquand et le troupeau – montage ANCVB
Jean-François Duvic a accueilli les participants au nom du président des Amis de Léoncel, Yannick Veyrenche, empêché. 43 personnes étaient présentes, et pas uniquement de Léoncel et de La Vacherie : le cheval de Barraquand attire beaucoup d’intérêt.
Ci-contre : les organisateurs. Photo Anita Faisan.
François Lejeune a présenté de manière très vivante et très précise les origines de la race et la démarche menant à sa reconnaissance officielle en 2017, le faisant rejoindre le petit groupe des « chevaux de territoire » français. L’élevage Barraquand avait disparu après 1963, mais un des petits-fils de Jules, Jean-Louis Barraquand, crée en 1988 un élevage à partir de quelques chevaux. D’autres éleveurs à partir de 1985 s’étaient lancés dans la même démarche, et en 2014 l’Association nationale Cheval du Vercors de Barraquand est fondée.
Pourquoi ce nom à deux particules pour un modeste cheval de travail ? L’Association a constaté l’usage simultané par les éleveurs et les acheteurs des deux termes « cheval de Barraquand » et « cheval du Vercors », et l’administration a accepté cette appellation. Mais, comme l’imagine F. Lejeune, on aurait pu l’appeler « cheval de Léoncel »…
En effet, on peut remonter l’origine de la race assez loin, c’est-à-dire aux chevaux décrits au début des années 1770 par dom Périer, prieur de l’abbaye de Léoncel. Les traits qu’il leur donne sont ceux du Barraquand : « Les chevaux nés dans ce pays sont vifs, robustes, déliés, jambe sèche et nette, pied sûr, la selle dure comme leur constitution qui vient de l’air toujours froid ou frais et d’une pâture de foin sec et moelleux. » [voir Michel Wullschleger : « Cisterciens de Léoncel. Les prieurs du dernier demi-siècle (1739-1790). » Cahier de Léoncel n° 6, p. 18-33.]
L’élevage de chevaux s’est répandu dans le sud du massif du Vercors, à partir de la première moitié du 19e siècle. Les communes de la Vernaison et du Royans, Léoncel, Le Chaffal, Plan-de-Baix et Omblèze deviennent des pays de cheval : la seule région des Alpes à élevage équin. Chaque ferme avait sa jument poulinière ; les étalons du haras national d’Annecy venaient à La Chapelle-en-Vercors, à Saint-Jean-en-Royans. [Voir Jules Blache : « Les massifs de la Grande-Chartreuse et du Vercors », éd. Didier-Richard 1931. Tome 2, livre III, chapitre I]
Jules Barraquand, à partir de 1894, constitue un troupeau, qui transhume, de 1908 à 1954, deux fois par an entre Vercors et Crau : 200 km en 5 étapes. [Voir Charles Gardelle « Alpages, terres de l’été. Dauphiné » éd. La Fontaine de Siloé, 2001, p. 236 et suivantes]. En fin de l’article, voir les cartes de l’itinéraire.
La race est bien vivante, elle peut servir « à deux fins » , c’est à dire à l’équitation et au travail. Mais rares encore sont les usages en exploitation agricole, alors qu’elle est adaptée aux travaux en viticulture, maraîchage, ou au transport sur bât. Mais la race reste fragile : le cheptel compte environ 250 chevaux, avec une vingtaine de poulains chaque année. Le maintien du patrimoine génétique est donc un problème important pour les éleveurs, qui ne veulent pas faire disparaître les caractéristiques de la race.
La séance s’est achevée plus tardivement que prévu… les échanges ont été nombreux.
Ci-dessous, photographies faites durant le film.
Le trajet du troupeau en 1946
Cet itinéraire est donné par Jean-Xavier Dussert dans une thèse de médecine vétérinaire soutenue en 1947 : Les chevaux du Vercors, élevage et transhumance. L’auteur a accompagné le troupeau en juin 1946, d’Arles à Léoncel.
Itinéraire dans les Bouches-du-Rhône : des pâtures d’Arles (Mas Cadenet) à Rognonas, pour passer la nuit sur l’aérodrome de ce village (en herbe) et traverser le lendemain la Durance sur le pont de Rognonas (tracé orange). Le film tourné en 1947 montre le troupeau passant la Durance au pont de Bonpas (tracé rouge).
Itinéraire en Vaucluse. Deuxième jour, de Rognonas à Bédarrides. Passage de la Durance, Avignon, Le Pontet, Sorgues Bédarrides en empruntant la Nationale 7. Nuit au château des Taillades. Troisième jour par des chemins vicinaux : de Bédarrides à Taulignan, en passant par Jonquières, Violès, Sainte-Cécile-les-Vigne, Tulette, Visan, Valréas. Nuit sur le champ de foire de Taulignan.
Itinéraire dans la Drôme. Quatrième jour : de Taulignan à Puy-Saint-Martin. Cinquième jour : de Taulignan à Crest. Enfin, sixième étape : de Crest à Léoncel, par Aouste-sur-Sye, Beaufort, Plan-de-Baix, La Vacherie.
Le troupeau s’installe à Léoncel, puis monte à l’Echaillon, puis ensuite à Font d’Urle.
Il refait la route en sens inverse en octobre.