La marche commentée a eu pour objet de parcourir le site karstique des combes de La Blache et de Charchauve, et d’évoquer l’implantation de l’abbaye au sud du Chaffal. L’époque choisie a permis également de belles observations naturalistes, en particulier botaniques.
Les commentaires ont été assurés par Jean Marc Vacher (géologie), Chantal Hugouvieux (botanique), Denis Hyenne (histoire des lieux).
Cliché de titre : chemin des combes – au fond le Vellan et La Blache, par Claude Milan.
L’incertitude météorologique a malheureusement limité la participation à une dizaine de personnes – la sortie s’est pourtant déroulée sous le soleil annoncé.
La marche part du hameau de La Blache (commune de Plan-de-Baix) pour rejoindre les prés de Charchauve (commune de Gigors-et-Lozeron). Après avoir descendu et remonté les combes de La Blache, l’itinéraire emprunte un chemin vicinal sud-nord, qui est l’ancien chemin de communication entre Beaufort-sur-Gervanne et La Vacherie. Dans un article fondamental sur « les chemins de transhumance et itinéraires anciens dans la vallée de la Gervanne » (Cahier de Léoncel n° 1, p. 25 – 31 – carte p. 31), Jean-Noël Couriol le nomme « chemin des muletiers » pour le différencier de l’itinéraire principal des troupeaux (dénommé « chemin de la beilhe« ) passant plus à l’ouest, sur le plateau de Chauméane (commune de Combovin). Ce chemin des combes a été utilisé régulièrement jusqu’au XXe siècle : il était plus pratique que la route moderne pour les attelages de chevaux car il évitait la montée de Plan-de-Baix. L’itinéraire de la marche, après le creux du Verger, reprend la direction du sud, par les prés de Barine, pour revenir au point de départ.
L’abbaye de Léoncel, très tôt, acquiert un domaine à Charchauve (grange attestée en 1176), qui sera étendu au cours du siècle suivant et complété de droits importants sur Côte Blanche – voir l’article de Bernard Jobin « Charchauve, Le Chaffal et Comberoufle dans les chartes de l’abbaye de Léoncel au XIIIe siècle« , Cahier de Léoncel n° 7, p. 39 – 45. Le lieu était important : plus bas et plus méridional que Léoncel, il permettait un étagement des cultures et de l’élevage. Une dépression, à l’est de la grange, porte le nom de « verger » (« Comba de Pomerio ou Pomerya, ou simplement au génitif Pomerii » , citation transcrite par Michel Wullschleger dans « Itinéraires cisterciens au pays de Gervanne », Cahier de Léoncel n° 24, p. 149). Le « chemin des muletiers » donnait un accès aisé à la grange. « Au pied de Côte Blanche, illustrant l’effort de nos moines pour contrôler les passages, l’ancienne grange de Charchauve surveille le vieux chemin muletier de Beaufort au Royans, fragment d’un itinéraire de Lyon à Marseille par la montagne et à l’abri des gros péages du bas pays. » (Michel Wullschleger, « Marche commentée de l’abbaye au cellier de Saint-Julien.« , Cahier de Léoncel n° 3, p. 82 – 83.)
Le site où nous progressons est à la fois discret et spectaculaire. Il est indiscernable de la route de Plan-de-Baix / col de Bacchus, car les différents plans, boisés, se confondent sous l’échine de Côte Blanche. Sur place, on découvre un paysage karstique bien caractérisé avec des combes si marquées qu’on les nomme canyons. Les explications de Jean-Marc Vacher donnent les clefs de compréhension. Sous l’anticlinal sud / nord de Côte Blanche deux canyons entaillent la dalle calcaire séparant Côte Blanche du Vellan.
- À l’est, le canyon des Combes (combes de La Blache) parcourt la dalle du nord (sous le Chaffal) jusqu’au hameau de l’Anchâtra (Combe Large), et au-delà jusqu’à la Gervanne.
- À l’ouest, le canyon de Côte Blanche (ou de Charchauve) est un canyon affluent du précédent : ils confluent à l’aval de La Blache. Deux arrachements (Dusi et Barine) l’obstruent, sur deux tronçons de son parcours, par un éboulis non complètement étanche. Tête Dure fait face à l’arrachement du nord (Barine) et les Vingt Cinq font face à l’arrachement du sud (Dusi).