La Charte du Parc naturel régional du Vercors 2008 – 2020 est remplacée par la Charte 2024 – 2039. Une enquête publique a porté sur le projet de nouvelle Charte. Des associations culturelles, dont Les Amis de Léoncel, ont communiqué aux commissaires – enquêteurs leurs observations sur la place de la culture dans le projet de charte.
Le projet de nouvelle Charte comporte trois axes :
- Vercors à vivre : actions concernant les milieux naturels, les activités agricoles et forestières, l’offre touristique.
- Vercors en transition : actions de la transition énergétique, climatique, alimentaire.
- Vercors territoire de partages : actions sur le partage des milieux et des ressources, sur les valeurs d’accueil et de solidarité, et, en dernier lieu, actions culturelles : « Animer une culture commune pour un territoire vivant. »
On voit un retrait important par rapport à la Charte précédente : le projet pour la culture est classé en dernier rang du dernier axe de projet (Mesure 3.6 de l’axe 3). Or dans l’actuelle Charte, la culture figure dans l’axe 1 du premier objectif stratégique.
La culture mérite un rang différent : son rôle dans l’identité du PNRV et dans la vie des habitants du Vercors doit la faire intégrer dans l’axe 1 Vercors à vivre de la nouvelle Charte.
La charte est consultable sur le site du PNRV : Bienvenue dans le Vercors ! | Parc naturel régional du Vercors (parc-du-vercors.fr)
L’historique du PNRV (p. 13 de la nouvelle Charte) rappelle comment le Parc a mené ses premières actions envers les collectivités : « Ces actions s’appuient sur un lien étroit avec des acteurs de la culture, de l’histoire et de l’éducation populaire, soucieux de cultiver une identité locale vivante et ouverte sur le présent ». Mais une évolution ultérieure est constatée (p. 16) : « Enfin, la priorité accordée à la valorisation des patrimoines naturels au détriment du patrimoine culturel global ne va pas sans interrogation ».
Ce constat est net, mais fait croire à une opposition entre patrimoines naturels et patrimoines culturels, opposition que ne portaient aucun des acteurs et défenseurs de la culture et de la nature. La réalité a été autre, et elle est rappelée plus loin (p. 17) : « (…) l’animation autour des projets culturels a pâti d’une réduction des moyens alloués à la culture ». La suppression du CPIE est citée ; on aurait pu citer la quasi-disparition de la médiathèque du PNRV.
L’introduction des axes de projet (p. 23) porte les idées forces de la concertation intervenue pour l’élaboration de la nouvelle Charte, dont : « Les participants témoignent du fait que le Vercors est un territoire disposant de réels atouts, et notamment ses patrimoines naturels, historiques et culturels auxquels ils sont fortement attachés ».
En classant la culture en dernier rang des actions, on ne ferait qu’entretenir « l’essoufflement » relevé lors de la démarche de concertation (p. 23).
Les Amis de Léoncel peuvent témoigner d’un exemple significatif de cet « essoufflement ».
Chaque « Fête du Bleu » (action organisée par le Parc) comprenait un espace des auteurs pour les auteurs locaux et les associations culturelles proposant leurs ouvrages ou revues. Les visiteurs étaient nombreux, les contacts étaient fructueux entre associations. En 2019, l’organisation de la Fête a exclu de cet espace l’association Les Amis de Léoncel et leur revue Les Cahiers de Léoncel. Non sans difficultés, les dirigeants de l’association ont pu faire revenir sur cette décision non motivée (Léoncel étant commune du PNRV depuis sa création, l’association œuvrant sur des thèmes régionaux).
En 2023, ni l’existence de cet espace des auteurs, ni la présence des Cahiers de Léoncel, n’étaient encore assurées en mai.
C’est montrer une méconnaissance, ou un refus, des atouts culturels du territoire, et dénier aux habitants du Vercors l’accès aux productions culturelles du Vercors.
On voit la fragilité d’une inscription dans la Charte : la culture devait être une « orientation fondamentale » (axe 1 de la Charte de 2008), mais, pour un événement majeur dans la vie du Parc, l’offre culturelle est ainsi réduite à une variable d’ajustement des surfaces disponibles.
La Charte devrait préserver de telles déviations des priorités par une évolution du texte.
- Intégration du chapitre « Culture » dans l’axe 1, car la culture est un élément de la qualité de vie sur laquelle se fonde cet axe 1. L’introduction de cet axe (p. 34) porte que « La qualité de l’environnement est indéniable. Le tissu social et associatif est actif. Et de nombreuses activités valorisent ressources et patrimoines locaux ». Mais le social et l’associatif n’apparaissent plus dans la suite.
La qualité de vie ne se restreint pas à l’économie et au patrimoine naturel : les habitants du Vercors, qu’ils en soient originaires ou non, développent une vie culturelle qui fait partie de leur vie professionnelle et de leur vie citoyenne.
- Rédaction plus précise du chapitre « Culture ». Les actions proposées doivent être rendues plus ambitieuses à la fois pour répondre à la demande culturelle et pour renforcer le rôle du Parc (et donc la visibilité de l’institution). Le thème de « culture commune » est porteur, mais il n’est pas précisé : il faut le définir si on veut orienter les actions du Parc et donner aux acteurs culturels la possibilité de s’inscrire dans ce thème.
- Affirmation de la volonté de suivi des priorités culturelles. La nouvelle Charte prévoit un dispositif de suivi et d’évaluation (p. 121) qui permettra d’éviter « l’essoufflement ». Les indicateurs concernant la priorité culturelle doivent être construits collégialement, avec les acteurs culturels. De même, l’évaluation collégiale prévue doit intégrer, de façon large, les acteurs présents dans le territoire du Parc.
Il faut mettre en avant la volonté de suivi et d’évaluation. Les priorités de la précédente Charte n’ont pas été correctement suivies : on le voit dans le domaine culturel. Mais on le voit aussi dans le domaine environnemental : un texte circule actuellement sur le « VTT enduro » montrant que le Parc ne réagit pas à une nouvelle pratique contraire à la priorité de préservation du patrimoine naturel. La destruction de sites dans le silence des autorités du Parc porte, aussi, une forte atteinte à l’image du PNRV.
La Charte doit faire en sorte que le « Parc du Vercors » ne devienne pas une coquille vide.